NAO salaires : pourquoi nous validions l’accord
Faute d’une association d’organisations syndicales représentant la majorité des syndicats, la négociation nationale obligatoire se termine par un constat de désaccord entre la direction et les OS. Une signature aurait permis de contractualiser et donc garantir les augmentations, ce qui en cette période d’instabilité sanitaire, diplomatique et financière, n’était pas selon nous à négliger.
Rappelons d’abord le contexte de cette négociation : elle n’en a que le nom. L’entreprise détermine dès le mois de septembre l’enveloppe globale de masse salariale supplémentaire allouée à la MFPM. La négociation qui se déroule 4 mois plus tard ne laisse d’autre latitude que d’ajuster à la marge la proposition mise sur la table et déjà validée par la direction du groupe.
L’entreprise est, à la satisfaction des organisations syndicales, sortie depuis plusieurs années maintenant, d’un mode de négociation avec « jeu » de carotte/bâton à la signature : si vous signez majoritairement, vous aurez 0,1% ou 0,2% de plus ; sinon, l’entreprise se donne la possibilité de donner moins. Désormais, les choses sont transparentes : l’entreprise applique sa proposition, qu’elle ait été ou non signée par les organisations syndicales, sauf évènement géopolitique majeur : elle entend dicter sa politique salariale. Dont acte.
Dans ce contexte, la signature a une valeur symbolique, pour marquer un accompagnement ou un rejet.
La CFDT avait communiqué dès le mois de septembre à l’entreprise ses propositions. Elles comportaient des augmentations de 5% pour les agents et les collaborateurs et de 4.5% pour les cadres avec une augmentation générale pour tous afin que personne ne soit oublié.
La proposition finale de l’entreprise ne satisfait que partiellement la demande de la CFDT. Rappelons également que toutes les catégories recevaient plus que l’inflation.
Nous retenons en synthèse 2 points marquants.
L’un est très positif : après des années de traitement décalé de leurs collègues collaborateurs et cadres, les agents reçoivent pour la première fois une augmentation qui permet de faire progresser leur niveau de vie. Avec une part d’augmentation générale inédite qui fera que personne ne passera à côté du train. Dans la même veine, les collaborateurs n’ont pas été oubliés, comme ils avaient à juste titre pu le ressentir les années précédentes. C’est ce que nous avons voulu marquer par notre validation.
L’autre est beaucoup plus négatif, que ce soit dans la réalité des chiffres que dans sa perception : chez les cadres, la satisfaction – enfin ! – de la demande de la CFDT de recaler les salaires par rapport aux médianes marché conduit pendant le temps du recalage (2021 et 2022) à des disparités énormes d’augmentation entre salariés. Certains, positionnés en dessous de leurs médianes, ont reçu en 2021 ou vont recevoir des augmentations à 2 chiffres. Alors même que leurs collègues situés à la médiane ou au-dessus ont reçu une augmentation très faible en 2021 et encore inférieure à l’inflation en 2022, car sans le rattrapage l’augmentation pour ces cadres n’est que de 2.4% en comptant le cours d’année. Pourtant, tous font très bien leur travail et contribuent de manière similaire à la très bonne performance de l’entreprise.
L’annonce de la politique salariale 2022 a ainsi provoqué une émotion bien compréhensible dans la population cadre et la CFDT regrette vivement que l’entreprise n’ait pas fait l’effort d’assurer à tous le maintien a minima de leur pouvoir d’achat dans cette période charnière de recalage de la politique salariale. Elle en avait réellement les moyens et cette économie sur le dos des salariés vient s’ajouter à une autre, toute récente : le passage au réel des frais de déplacement : Profit oui, People ???
Reste la réalité des chiffres : le recalage sur les médianes marché est un acte de justice sociale qu’il aura fallu des années pour obtenir. Il a déjà et va probablement avoir une conséquence en termes d’affichage du pourcentage d’augmentation pour les cadres : l’entreprise distribue le même budget d’augmentation en donnant :
– 2,8% d’augmentation à une population positionnée, en moyenne, à 90% de la médiane marché,
– 2,5% d’augmentation à une population positionnée, en moyenne, à 100% de la médiane marché,
– 2,3% d’augmentation à une population positionnée, en moyenne, à 110% de la médiane marché.
L’entreprise gérant une masse salariale globale, le recalage sur le 100% marché aura très probablement un impact sur le niveau moyen des augmentations futures.
Les salariés dont le salaire est passé de 90 à 100 sont gagnants dans la durée.
Mais l’entreprise a fait le choix de « faire payer » les salariés qui étaient à 100 ou au-dessus, dans un contexte de réduction anxiogène les effectifs. La CFDT dénonce vivement ce choix et demande à l’entreprise de revenir rapidement à une politique plus équitable pour tous les cadres.
Dans ce contexte complexe la question de la validation a donné lieu à un débat démocratique interne où chacun a pu exprimer son point de vue, suivi d’un vote des adhérents : l’ensemble des sections des sites français industriels ou tertiaire s’est clairement prononcé en faveur de l’accord.
A court terme, pour l’année 2022, la CFDT sera très attentive aux résultats de l’année 2021. La communauté financière s’attend à ce qu’ils soient très bons. S’ils le sont suffisamment pour que les parts variables bénéficient d’un bonus, alors les cadres qui auront reçu une augmentation inférieure à l’inflation recevront une compensation partielle du « préjudice » de la politique salariale 2022. S’il y a distorsion entre la performance financière et sa redistribution aux salariés, la CFDT montera au créneau.