Après le greenwashing, la transition écologique et sociale à présent menacée par le greenblaming …
Le greenblaming est la tendance actuelle qui consiste à rendre l’écologie responsable de toutes les difficultés et crises économiques. Plus subtil que le climato scepticisme, le greenblaming ne nie plus frontalement les crises environnementales mais attaque les modalités concrètes de la transformation écologique.
On constate aujourd’hui dans le débat public une hausse des critiques des réformes environnementales, bien souvent sur des arguments non fondés. Prenons l’exemple du secteur automobile où le greenblaming consiste à rendre responsable les normes environnementales de l’augmentation des prix des véhicules neufs. Si on regarde les différentes analyses faites sur le sujet, on voit qu’en réalité, cette augmentation est d’abord due aux causes suivantes :la pénurie de semis conducteurs, l’augmentation des prix des matières premières, l’augmentation de la marge des constructeurs, l’augmentation de la taille ou l’enrichissement des modèles vendus. Les exemples de greenblaming font aujourd’hui légion ; la directive européenne sur le reporting environnemental est accusée de miner la compétitivité des entreprises, le devoir de vigilance a été récemment rejeté par les Etats car jugé trop contraignant…
Même s’il est facile de démontrer avec un peu d’analyse que les arguments utilisés ne sont pas cohérents, ces accusations parviennent à trouver des relais dans le monde politique, où l’on parle d’écologie “punitive“, provoquant “de graves désordres dans le monde“. Ainsi les politiques environnementales contraignantes sont diabolisées. Ce greenblaming s’associe à une dangereuse injonction à l’inaction et instille dans le débat public que la transition écologique serait néfaste, ou finalement pas si urgente, ni essentielle.
Or la Commission Européenne a récemment rappelé que maintenir le réchauffement climatique sous le seuil d’1,5 degrés éviterait près de 2 400 milliards d’euros de pertes économiques. L’étude de l’ADEME de 2023 montre aussi que tous les retards accumulés en matière d’inaction environnementale auraient des conséquences économiques majeures : jusqu’à -5 points de PIB en 2050, et près de 1100 milliards d’actifs échoués. C’est bien l’inaction qui semble la plus dangereuse et la plus coûteuse.
Restons donc vigilants face au greenblaming, vérifions les arguments utilisés et ne nous laissons pas influencer par certains groupements qui ont un intérêt souvent économique dans ces discours. Les salariés et les organisations syndicales ont un rôle à jouer en restant critiques face aux enjeux climatiques et en revendiquant une reconversion écologique dans des conditions socialement justes pour les travailleurs.
Sandrine Le Guilloux, élue CSE
Sources :
Collectif « Construire l’écologie », note sur le Greenblaming, « La construction de l’épouvantail écologique » du 6 décembre 2023
ADEME – Communiqué de Presse LES RISQUES CLIMATIQUES ET LEURS COÛTS POUR LA FRANCE : POUR PRÉSERVER L’ÉCONOMIE, L’URGENCE D’AGIR DĒS A PRÉSENT
Commission européenne : recommandation du 6 février 2024 pour un objectif de réduction des émissions à l’horizon 2040, en vue d’atteindre la neutralité climatique d’ici à 2050