Objectif 2050 et réalité constatée : mince il y a quelques incohérences…
Vous souvenez-vous du narratif Michelin déployé ce début d’année ? au cas où, quelques rappels : « Nous devons croître »…pour plusieurs raisons dont « croître pour attirer des talents et croître pour innover ». Et pour ça, bonne nouvelle « on a un plan (plan de conquête) ». Autre bonne nouvelle : « nous nous donnons les moyens de nos ambitions, » retenons notamment « notre expertise technique de pointe et notre volonté d’innover sans relâche. » D’ailleurs « on a une promesse de marque : Innovating for a better life in motion ». L’innovation et la croissance, on les veut « dans le pneu, autour du pneu, au-delà du pneu. » Et pour « nos clients pneus, on rêve qu’en 2050 Michelin soit reconnu comme un leader en innovation dont l’action a été décisive pour aider l’humanité à conquérir de nouvelles frontières. »
Juré, toutes les phrases en italique et entre guillemets sont bien extraites du narratif.
Ça vous revient ? Chouette orientation n’est-ce pas ? on s’attend donc à avoir ces fameux moyens de nos ambitions…Parmi les moyens attendus par beaucoup de salariés : des ressources suffisantes dans les secteurs clés pour le pneu, le « autour du pneu et l’au-delà du pneu ». Penchons-nous un peu sur ce qui nous permet de concevoir et d’innover dans le pneu qui, rappelons-nous, est le secteur qui fait vivre toute l’entreprise aujourd’hui. Et il semble donc impensable de déstabiliser ce domaine.
Pourtant que constatons-nous (des équipiers aux managers, voire managers de managers– même s’ils ne l’expriment qu’en aparté et à voix basse…) ? :
- Une pression dingue sur les effectifs pour satisfaire les objectifs de diminution des ETPs . Cette pression a des conséquences graves :
o Fuite des cerveaux et donc des compétences (les expérimentés compétents de nos domaines) vers des secteurs valorisés par l’entreprise comme plus porteurs (au-delà du pneu).
o Surcharge des équipes
o Démotivation et marasme
o Plus de temps pour la capitalisation (clé pour le maintien du savoir)
o Plus ou quasiment plus de recouvrements entre les partants et les arrivants…
o Evidemment plus de pépinières (bien trop luxueux pour notre époque !)
Aïe, Aîe Et donc…comment nos compétences vont-elles se maintenir à ce rythme ?
- Une diminution des effectifs notamment dans les secteurs du :
o Pneu
o Matériau
o des Outils & Méthodes
Aïe, Aîe …. ce sont pourtant des secteurs indispensables pour maintenir de l’innovation
- Une délocalisation des tests qui certes va diminuer des coûts, mais diminue aussi la compétence de nos chercheurs… car oui mettre les pieds au labo ou en atelier permet de comprendre beaucoup beaucoup de choses d’un point de vue technique…
- Pas de ressources suffisantes pour avoir des outils digitaux performants pourtant indispensables à l’innovation et à l’efficience tant souhaitées par l’entreprise (par l’absence de moyens suffisants pour développer des outils au-delà du strict nécessaire et par l’absence de ressources suffisantes pour l’évolution des fonctionnalités nécessaires pour s’adapter aux besoins qui changent et à l’agilité elle aussi demandée…).
- Pas de valorisation des compétences des équipiers marché : plus vous allez vers le concept, plus votre NR grimpe facilement avec moins de projets et donc un quotidien un peu plus serein. Pourtant un équipier marché a énormément de compétences clés pour l’entreprise, une compétence technique large et généraliste et une capacité à gérer énormément de sujets à la fois… alors comment attirer des talents dans ces conditions ? ben..dur dur…et de nombreux job postings ne trouvent plus preneurs dans ces équipes…
Aïe, aïe non seulement on a moins d’effectifs mais en plus, ils ne sont mêmes plus tous staffés.
- Des ressources matériaux et pneus complètement insuffisantes pour travailler dès 2022 sur les sujets durables de l’entreprise…mince…c’est pas l’objectif de 2050 ça ?
Relisez maintenant le 1er paragraphe de cet article…ça fait mal, non ? et beaucoup d’entre nous avons mal en ce moment face à ces incohérences…où sont passés les moyens de nos ambitions promis ? Il est urgent que l’entreprise réalise que les secteurs qui nous font vivre aujourd’hui et encore pour plusieurs années sont totalement déstabilisés, et qu’à ce rythme nous serons incapables de remonter les compétences qui nous seront pourtant indispensables…Il est temps que l’entreprise réalise que la perte de compétences va nous coûter bien plus cher que l’économie de masse salariale qu’elle cherche à faire…
Nous demandons donc que l’entreprise explique quels moyens concrets (humains -ressources et compétences-, tests, outils digitaux) elle met à disposition pour réaliser notre objectif 2050 parce que pour l’instant le plan de conquête reste extrêmement obscur…